L’ESHRE (European Society of Human Reproduction and Embryology) publie des lignes directrices (guidelines) très influentes dans le domaine de la médecine de la reproduction. Ces recommandations visent à guider les praticiens (gynécologues, biologistes, centres de PMA) vers des pratiques plus sûres, efficaces et personnalisées. Cet article présente une synthèse des dernières recommandations ESHRE concernant la stimulation ovarienne, la préservation de la fertilité féminine et les traitements spécifiques pour les femmes atteintes de certains cancers.
1. Stimulation ovarienne en PMA
Une des recommandations centrales d’ESHRE concerne la stimulation ovarienne dans le cadre de la FIV / ICSI. Le guideline “Ovarian Stimulation for IVF/ICSI” publié par l’ESHRE donne des orientations importantes :
- Il y a maintenant 46 nouvelles recommandations dans cette mise à jour, incluant des options pour les patientes à faible réponse ovarienne ou pour la prévention du syndrome d’hyperstimulation ovarienne (SHO).
- Avant la stimulation, on recommande une évaluation pré-stimulation personnalisée : ajuster les doses de gonadotrophines selon le profil ovarien et les risques.
- La suppression pituitaire (par exemple via un agoniste ou un antagoniste de GnRH) puis la stimulation doit être surveillée strictement : monitorage échographique et hormonal régulier pendant la stimulation.
- Pour le déclenchement de la maturation finale des ovocytes, on recommande des stratégies qui minimisent les risques de SHO, notamment selon le profil de la patiente.
- Le soutien du corps jaune (“luteal support”) après la ponction est également souligné comme essentiel pour améliorer les taux d’implantation, tout en réduisant les complications.
- En particulier, l’ESHRE insiste sur la prévention du SHO : l’un des points forts de leurs recommandations pour la sécurité des patientes à haut risque.
2. Préservation de la fertilité féminine : ligne directrice
L’ESHRE a publié un guideline spécifique pour la préservation de la fertilité féminine (“Female Fertility Preservation”) qui s’adresse à des patientes variées : femmes devant recevoir des traitements gonadotoxiques (cancer, maladie), personnes souhaitant congeler leurs ovocytes par choix (âge), etc.
Parmi les points importants :
- Il y a 78 recommandations couvrant : l’information et le soutien des patientes, l’évaluation avant la préservation, l’intervention (techniques), et les soins après traitement.
- Trois techniques principales sont recommandées :
- Cryoconservation d’ovocytes : particulièrement via vitrification, méthode de choix dans de nombreux cas. eshre.eu
- Cryoconservation d’embryons : classique et bien établie, mais doit prendre en compte les aspects légaux et le consentement du partenaire.
- Cryoconservation de tissu ovarien : utile quand il n’y a pas le temps de stimuler les ovaires, ou chez des patientes très jeunes.
- L’ESHRE rappelle l’importance de discuter des risques, du bénéfice, du timing, et des résultats probables lors du conseil initial, afin que la patiente prenne une décision réellement éclairée.
- Après l’intervention de préservation, un suivi est recommandé : évaluation hormonale, imagerie, et accompagnement psychologique si nécessaire.
3. Traitement conservateur (fertility-sparing) en cas de cancer de l’endomètre
L’ESHRE, en collaboration avec d’autres sociétés (ESGO, ESGE), propose des recommandations sur le traitement conservateur du cancer de l’endomètre chez les femmes qui souhaitent préserver leur fertilité.
Les points clés :
- La sélection des patientes est cruciale : seules certaines femmes avec un cancer de l’endomètre à un stade précoce peuvent envisager une prise en charge conservatrice.
- Les spécialistes doivent évaluer les caractéristiques oncologiques (grade, histologie) pour déterminer si un traitement épargne-utérin est sûr.
- Le traitement recommandé peut combiner des agents hormonaux (progestatifs) avec un suivi rigoureux, facilitant une possibilité de grossesse tout en contrôlant la tumeur.
- Une prise en charge multidisciplinaire (onco-gynécologue, spécialiste PMA, pathologiste) est essentielle pour garantir la sécurité et l’efficacité.
- Le suivi après traitement inclut des contrôles réguliers de la muqueuse utérine et des bilans hormonaux, afin de surveiller la réponse et évaluer les risques.
4. Approche qualité & bonnes pratiques selon ESHRE
- L’ESHRE publie un manuel de recommandations de bonne pratique (Good Practice Recommendations – GPR) pour les centres de PMA. Ce document définit comment appliquer les recommandations quand les données scientifiques sont limitées, et favorise la standardisation des pratiques cliniques et de laboratoire.
- Ce manuel met l’accent sur la sécurité, l’éthique et la qualité, notamment pour les laboratoires de reproduction, la préservation de la fertilité, et l’accès aux soins.
- Il recommande également que les sociétés nationales adaptent les lignes directrices ESHRE à leur contexte, tout en conservant les principes de base de qualité et de sécurité.
5. Limites, perspectives et développement futur
- Certaines recommandations sont encore en développement : par exemple, l’ESHRE travaille sur des nouvelles lignes directrices pour la cryotransfert d’embryons congelés, la psychosocialité en PMA, et la terminologie pour les grossesses ectopiques à l’échographie.
- Le champ de la préservation de la fertilité continue d’évoluer : des recherches sont en cours pour affiner les stratégies (techniques combinées, nouveaux protocoles de stimulation, etc.).
- L’ESHRE insiste sur l’importance d’un conseil spécialisé et personnalisé, compte tenu de la diversité des situations (cancer, choix social, âge, pathologie sous-jacente).
Conclusion
Les recommandations ESHRE actuelles constituent une boussole essentielle pour les praticiens de la PMA et de la médecine reproductive. Elles couvrent des domaines stratégiques comme :
- la stimulation ovarienne personnalisée,
- la préservation de la fertilité chez les patientes à risque,
- et le traitement conservateur du cancer en maintien de la fertilité.
Pour les femmes, cela signifie une prise en charge plus sûre, plus éclairée, et plus respectueuse de leurs projets de vie. En tant que gynécologue, le Dr Calvo peut s’appuyer sur ces lignes directrices pour offrir des soins reproductifs de haute qualité, fondés sur les meilleures preuves disponibles en Europe aujourd’hui.

